Notre Grand-Mère la Lune

À 75 ans, Qaletaqa « Gardien » était l’homme le plus sage de la tribu mojave. Il s’était habitué à ce nom, bien qu’il préféra celui que se donnaient ses ancêtres, Pipa a’ha macave, « le peuple qui vit près de l’eau ». Le grand fleuve Colorado. Mais c’était avant que les Blancs ne confisquent leurs meilleures terres, ne leur laissant que de vastes étendues désertiques; au Sud de la Californie, en Arizona et au Nevada. Chaque année, Qaletaqa recevait des visiteurs venant de tribus voisines, qui parlaient diverses langues yumanes.…

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Savez-vous planter des choux?

En latin, planta désigne primitivement la plante du pied. Le verbe plantare, devenu planter, signifie d’abord « enfoncer en terre avec le pied ». Cette technique de plantation, décrite dans la chanson Savez-vous planter les choux?, consiste à creuser dans le sol avec le pied le trou qui doit recevoir la jeune pousse, autour de laquelle la terre est ensuite ramenée et tassée par ce même pied. Les adeptes du jardinage savent bien que le pied a toujours son usage en horticulture. Mais dans les langues romanes, la référence au…

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Après-concile

Concile est issu du latin concilium « convocation » et « assemblée délibérante ». En latin chrétien, il développe le sens de « réunion des évêques de l’Église catholique, légitimement convoquée pour statuer sur des questions de dogme, de morale ou de discipline »: Conseil œcuménique. Au pluriel, il décrit les décrets et canons de ces assemblées: recueil des conciles. L’ancien français, celui du 14e siècle, donnait au mot la valeur dérivée de « conversation entre personnes » et « diffusion d’une nouvelle ». Sens laïque conservé en français moderne,…

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Couvre-chef

Chef est issu du latin classique caput qui désigne la tête des hommes et des animaux. L’évolution du mot en italien, capo, en espagnol et en portugais, cabo, est moins sentie qu’en français. Ce sens de « tête » est concurrencé puis éclipsé par testa « crâne ». Au 17e siècle, il ne subsiste que dans le composé couvre-chef « qui couvre la tête, chapeau ». Le mot évoque aussi le sommet, la source, la pointe dans une acception géographique de cap. ll prend le sens imagé de celui qui est à…

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Porter la moustache

On peut la porter, la tailler, la tortiller, la retrousser, la lisser, la cirer, la couper. Elle pousse par paire, rugueuse, hérissée, frisée, tombante, à la gauloise, à la tartare, à l’impériale, en brosse, en croc. La moustache est la partie du système pileux qui garnit la lèvre supérieure de l’homme. Le mot, issu du grec byzantin mustakhion, est emprunté au napolitain mustaccio, correspondant à l’italien mostaccio « museau », « visage ». Il est usité au singulier comme au pluriel. Par analogie, moustache désigne les grandes soies tactiles que de nombreux…

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Pour un flirt

Flirter, « avoir un flirt avec quelqu’un », est la francisation du verbe anglais to flirt « s’agiter », puis « folâtrer », qui a été rattaché au moyen français fleureter « voler de fleur en fleur, faire la cour ». L’expression galante conter fleurette date du 17e siècle. Flirter prend, au figuré, le sens de « se rapprocher d’adversaires politiques ou idéologiques ». Au Québec, on l’emploie dans le sens de « caresser l’idée », un calque de l’anglais to flirt with an idea. En français standard, flirt, de l’anglais flirt, désigne une amourette, une…

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Aller tout croche

Croc est issu du francique krok « crochet ». Les dérivés sont nombreux: crocheter, crochetage, crocheteur, crocher, croc-en-jambe, accrocher, accrochement, accroc, accroche, accrochage, accrocheur, accroche-cœur, raccrocher, raccrocheur, raccrochage, décrocher, décrochage, décrocheur, anicroche, escroc, recroqueviller. Féminin, croche désigne les tenailles du forgeron, puis la note de musique dont la queue porte un crochet. Adjectif, il décrit ce qui est recourbé en forme de crochet: nez croche, doigts croches; et, au figuré, une personne malhonnête, un être avide et rapace. Son synonyme crochu l’a supplanté en français standard. Au Québec, croche est…

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On achève bien les chevals

La formation des pluriels en –aux est très ancienne. Elle semble remonter au 7e siècle, traversant différents stades sur le plan de la graphie et de la prononciation : chevals, chevaus, chevax, chevaux. Pour comprendre comment on a pu passer de –als, pluriel de chevals, où la voyelle /a/ et les deux consonnes /l/ et /s/ étaient prononcées, à la succession –aux de chevaux qu’aujourd’hui nous prononçons /o/, il faut savoir qu’à l’époque de la formation de la langue française, l’articulation du /l/ était teintée, devant une voyelle, d’un écho…

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La belle lurette

« Je ne suis certainement pas doué pour la parole. C’est peut-être pourquoi je me suis mis à écrire. » (Henri Calet, 1904-1956) Son premier roman, Calet le publie en 1935: La belle lurette. C’est l’histoire, comprends-tu, en grande partie, de l’auteur lui-même, né début 1900, qui passe son enfance à Paris et son adolescence à Bruxelles. Parmi les petites gens, marchands à la sauvette, pâles putains, pouilleux, ivrognes, insoumis. Êtres fragiles et marginalisés. Vivant le présent dans l’inquiétude. L’écrivain les décrit avec humanité et indulgence car il les a…

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Bouillon de culture

Le mot culture est issu du latin cultura « action de cultiver la terre » et, au figuré, « action d’éduquer l’esprit ». En vieux français, il s’écrit couture, une forme conservée en France dans quelques parlers septentrionaux et en Normandie où il a fourni les noms de famille Couture et Lacouture. Par extension, le mot décrit l’action de tirer du sol les végétaux utiles à l’homme: agriculture; et, ultérieurement, l’élevage de certains animaux: culture des huîtres; puis l’action de faire croître des micro-organismes en milieu approprié: culture in vitro.…

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Au revoir, Minou noir

Minou noir est mort. À seize ans. Pas à un âge de patriarche, juste de vieux minou. Une amie de ma deuxième fille, Hervée, lorsqu’elle était au primaire, nous l’avait confié en adoption. Né dans une ruelle, il était le seul, parmi nos quatre chats, qui allait dehors. Un besoin irrépressible. Au point, l’été, de défoncer les moustiquaires pour sortir prendre l’air et se coltailler avec les autres chats du voisinage. Il avait d’ailleurs perdu un bout d’oreille durant l’une de ces rixes. Je n’ose imaginer quel bout manquait aux…

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Vraie bargaine

Barguigner, attesté en latin médiéval sous la forme barcaniare, « faire du commerce », est un emprunt au francique borganjan, formé au 12e siècle du croisement de borgen « prêter, emprunter », encore vivant en allemand contemporain, et waidanjan « gagner ». Dans son acception première, le verbe signifie « marchander longuement » mais par référence à la durée de certains marchandages, il prend le sens d’« hésiter » ou « avoir de la peine à déterminer », particulièrement quand il s’agit d’un achat, d’une affaire, d’un traité. Ce sens a survécu dans…

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