La dureté du mental

Le mot mental vient du bas latin mentalis « de l’âme, de l’intellect », dérivé de mens, mentis « principe pensant, activité intellectuelle ». Mens est issu lui-même de la racine indoeuropéenne men- « penser ». Comme adjectif, il décrit ce qui se fait dans l’esprit, sans expression orale ou écrite: calcul mental, exercice mental. Ce qui fait appel aux facultés intellectuelles en ce qui concerne sa santé et éventuellement son aspect pathologique: étal mental, aliénation mentale, maladie mentale. En psychologie, il révèle le degré de développement attribué à un individu, généralement…

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Abracadabra

Abracadabra est un mot monosémique aux origines cabalistiques. Il désigne une formule magique pour guérir les maladies. Présent dans la tradition grecque et attesté en latin tardif dès le 3e siècle, le mot est une altération de l’hébreu arba dak arba. En boustrophédon, une écriture primitive utilisée par les Grecs et en Asie mineure dont les lignes vont sans interruption de gauche à droite puis de droite à gauche, la formule hébraïque signifie littéralement « Que le quatre anéantisse le quatre », c’est-à-dire que Dieu – quatre étant un cryptogramme représentant…

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Du tac au tac

Le mot tac, relevé au 16e siècle, est d’origine onomatopéique : takk- qui exprime, en emploi unique, un bruit sec, comme ses variantes tikk- et tokk-. Redoublé, il décrit un bruit sec émis à intervalles réguliers et rapprochés, particulièrement le tir ininterrompu d’une mitrailleuse, d’une arme automatique: tac, tac, tac, tac ou tactactactac. En escrime, dans une passe d’armes, il décrit le frottement métallique d’une lame contre une autre. La parade du tac est l’action d’écarter le fer adverse d’un mouvement sec et rapide du poignet terminé par un battement. La…

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Air bougon

Bougonner est un régionalisme orléanais du 17e siècle qui signifie « exécuter un ouvrage de manière malhabile ». Les dialectes normand et du centre de la France l’utilisent encore aujourd’hui avec ce sens, tandis que ceux de Vendée, du Vendôme et du pays de Chaux l’emploient dans des acceptions dérivées. Le verbe ressemble à l’anglais to bungle « bâcler, faire les choses n’importe comment », attesté d’abord en 1530 sous la forme to bongyll. En 1798, dans le Dictionnaire de l’Académie française, bougonner signifie « gronder entre ses dents ». Son emploi est successivement…

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À poil

Le mot poil s’écrit d’abord peil en 1080. Il est issu du latin pilus, « poil ou cheveu pris isolément ». Distinct du collectif capillus qui désigne plusieurs poils et une chevelure abondante ou dégarnie. En biologie humaine et animale, il décrit le phanère cutané ayant l’aspect d’un filament flexible et résistant, dont l’extrémité libre est plus ou moins effilée, alors que celle qui est enchâssée dans la peau est légèrement renflée et excavée en son milieu pour loger une papille dermique : touffe de poils. Plus simplement chez l’être humain, il…

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Avoir du coffre

Le latin impérial cophinus « corbeille », transcription du grec kophinos, a produit en français les mots coffre et couffin; ce dernier désignant un meuble en forme de caisse, comme on le retrouve en latin médiéval. Utilisé pour nommer une pièce maîtresse du mobilier au Moyen âge, coffre a reçu plusieurs spécialisations fonctionnelles: coffre-fort, coffre à bijoux, coffre (d’automobile), coffre à bagages, coffre à outils, coffre de bord, coffre au trésor, coffre de cèdre. Par analogie de forme, le mot est passé dans le domaine de l’anatomie pour désigner le…

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Ci-gît

Le verbe défectif gésir apparaît au passé simple dans la seconde moitié du 10e siècle. Il vient du latin classique jacere « être couché, être étendu », sens qui se rattache à la racine indoeuropéenne ye- « jeter ». Aujourd’hui, il ne se conjugue plus guère qu’au présent de l’indicatif : je gis sur mon lit; à l’imparfait : nous gisions dans nos effluves; et au participe présent : gisant, nos deux corps tout flasques. Le verbe reprend le sens latin d’« être couché, immobile » par suite d’un malaise, d’une blessure, d’une maladie, d’une…

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Kesse tu fa dbo

Le « texto » est la langue abrégée des courriels et des cellulaires. Sigles, mots tronqués, utilisation phonétique des chiffres et des lettres, « émoticônes » – binettes créées avec les signes de ponctuation qui se lisent en penchant la tête pour ajouter une émotion aux propos échangés –, tout est permis. Cette forme de communication suscite un engouement auprès des jeunes. Elle est aussi représentative de notre société axée sur la rapidité et la concision des échanges. En plus de permettre de jouer avec le langage sans se soucier de l’orthographe ou de…

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Langue d’oïl

« Chose inouïe, la naïade laissa sa pagaïe et sauta naïvement du canoë. Stoïque héroïne face au caïman. L’aïeul l’accompagnant pensa: sans doute est-ce une blonde humanoïde venue d’un astéroïde lointain. Puis il sentit égoïstement ses spermatozoïdes archaïques se raidir dans son membre phalloïde; se rappelant, coïncidence aigüe et bizarroïde, que son dernier coït remontait à il y a 30 ans aux Caraïbes, avec une collectionneuse de bonsaïs. Et il plongea sans ambiguïté sa baïonnette dans la bête. » Le mot tréma, orthographié trematz au 17e siècle, est issu du…

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Faire la baboune

Baboune est une déformation de babouine, un archaïsme attesté dans le Larousse universel au 19e siècle, lui-même issu de babine « lèvre pendante de certains animaux ». Au pluriel, le mot évoque par plaisanterie des lèvres charnues: avoir de grosses babounes, une paire de babounes. Au singulier, il décrit avec une connotation amusante la partie inférieure du visage: recevoir une tape sur la baboune, avoir la baboune enflée. Faire la baboune est une expression populaire au Québec qui exprime du mécontentement ou de la contrariété par une attitude maussade ou boudeuse. Le…

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Galantiškumas

La Lituanie est un pays balte où l’on parle principalement lituanien, russe et polonais. Mais aussi français, sans même que ses habitants le sachent. Depuis le Moyen Âge jusqu’à aujourd’hui, quantité de mots français ont circulé à travers l’Europe. Sous l’impulsion, principalement, des alliances, des conquêtes territoriales, des motivations religieuses ou par les voies commerciales, de tout temps favorables aux échanges linguistiques. Des mots apportés au-delà des frontières de la France par les chevaliers, les pèlerins, les clercs, les poètes, les artistes, les philosophes, les étudiants, par des princes, des…

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Il pleut sur Val-d’Or

À Val-d’Or en Abitibi, début des années 60, j’avais dix ans. Mes sœurs, mes cousins, mes cousines et moi étions souvent ensemble car nos parents et grands-parents organisaient de fréquentes rencontres familiales, chez l’un et chez l’autre. Nous nous amusions beaucoup. Nous écoutions les adultes parler de la pluie et du beau temps. Mais aussi de sujets plus sérieux. Puis, nous émettions nos propres opinions sur les grandes et les petites affaires de la vie. Ainsi, pour nous, les enfants, l’aéroport de Val-d’Or était, croyait-on, une base militaire américaine avancée…

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A-B-C-D-E-F-G

Alphabet est un emprunt au latin tardif alphabetum, employé par l’Église au 12e siècle en même temps que abecedarium. Le mot est un calque des deux premières lettres du grec alpha et bêta, deux formes elles-mêmes empruntées aux langues sémitiques, l’hébreu ‘aleph et l’araméen beta. Il a toujours désigné un « système ordonné de signes graphiques dans une écriture » appliqué aux systèmes latin et grec, mais aussi à un grand nombre d’écritures depuis le phénicien, premier modèle d’alphabet syllabique. Au 16e siècle, il prend le sens usuel de « livre d’apprentissage à…

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Tam ti delam tam ti dela ditam

D’origine médiévale, turluter apparaît au 12e siècle en France sous la forme turlueter qui signifie « jouer de la cornemuse ». Au 18e siècle, turlutter prend le sens d’« imiter le chant du turlut, un oiseau, et « contrefaire la musique du flageolet », une flûte. Aujourd’hui, en français standard, le verbe signifie « chanter comme un oiseau », en particulier comme le pipit des arbres et le pipit des prés. Au Québec, il revêt le sens spécifique de « fredonner, chanter sans paroles en répétant un motif sonore sur un…

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Babouches aux pieds

Une babouche est une pantoufle orientale sans contrefort au talon. Le mot constitue un emprunt au turc papus « chaussure », lui-même pris au persan papus de pa « pied » et pus « couvrir », duquel s’est inspiré l’arabe babuš. L’espagnol babucha vient du français. L’italien babbùccia a aussi emprunté le mot turc. Dans les langues romanes, l’alternance p/b est fréquente dans l’adaptation de mots empruntés aux langues orientales, particulièrement à l’Empire ottoman. En France, une tong est une sandale de plage, inspirée de la gheta japonaise, en plastique…

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Mare aux canards

Canard est un sobriquet expressif dérivé du même radical onomatopéique que l’ancien verbe caner qui, au 13e siècle, signifiait « caqueter ». Le mot est formé avec le suffixe –ard, d’après malard, la plus ancienne désignation du canard mâle. Il désigne l’oiseau aquatique au bec jaune, large, aux ailes longues et pointues, aux pattes palmées dont les activités principales, sur la surface de l’eau, consistent à cancaner, barboter, se dandiner, nager et plonger : canard sauvage, canard domestique; lesquels s’avèrent savoureux en bouche : canard laqué, canard à l’orange. Les particularités physiques du…

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Un jour sans

La préposition sans, issue du latin sine, s’écrit d’abord sen, sens, senz, seinz et sainz, avant d’adopter sa forme définitive vers 1200. Placée devant un nom ou un pronom, elle marque l’absence: être sans argent; l’exclusion: chambre d’hôtel sans petit-déjeuner; ou un tour à valeur hypothétique: sans cela, sans quoi. Elle exprime l’idée de négation dans de nombreuses locutions adjectives ou adverbiales: sans égal, sans pareil, sans précédent, sans arrêt, sans conséquence, sans crainte. Suivie d’un infinitif, elle sert à éliminer une circonstance: sans compter, sans mentir, sans s’arrêter, sans…

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Jeu de rôle

Rôle est issu du latin médiéval rollus « rouleau », dérivé du bas latin rotulus « petite roue », diminutif de rota « roue ». En français, le mot adopte diverses orthographes entre les 12e et 16e siècles : rolle, role, roole, roolle, avant d’adopter sa graphie définitive vers 1550. Ses premiers emplois sont les mêmes qu’en latin : « parchemin roulé », « liste, énumération ». Puis, dans la langue administrative et juridique de l’État, « titre, page d’acte notarié, d’expédition de jugement, charge fiscale, relevé officiel » : rôle d’impôt, rôle d’équipage, «…

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C’est un joli nom, camarade

Camarade vient de l’espagnol camarada « chambrée », de camara, « chambre », ce qui rappelle qu’à l’origine les camarades étaient ceux qui partageaient la même chambre. Le sens de « personne qui partage le sort d’une autre » s’est dégagé dans un contexte militaire espagnol: camarade de régiment. Il s’est répandu dans l’usage avec la valeur de « personne qui a les mêmes habitudes ou occupations qu’une ou plusieurs autres personnes, et contracte avec elles des liens de familiarité », fournissant des appellatifs aujourd’hui quasi-désuets: camarade de jeux, camarade de travail, vieux camarade. Dans un contexte lié…

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Mordre à belles dents

Mordre est issu du latin mordēre, « entamer avec les dents » et, au figuré, « tourmenter »à propos de paroles ou de l’action du froid. Le verbe est repris par l’italien mordere, l’espagnol, le catalan et le portugais morder. En français, il conserve le sens latin de « saisir avec les dents » : mordre dans une pomme, se mordre la langue; parfois avec l’intention d’attaquer, de se défendre ou de blesser : mordre jusqu’au sang, mordre jusqu’à l’os; et, en particulier chez les animaux : se mordre la queue. Au figuré, la…

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Prêt à partir

Partir est issu du latin classique partiri « diviser en parts ». Ce sens est concurrencé puis éliminé par partager et par ses préfixes verbaux répartir, impartir et départir. Il survit toutefois dans la locution vestige avoir maille à partir qui s’est fixée au 17e siècle. La maille – la moitié d’un denier – était la plus petite monnaie sous les Capétiens, donc indivisible. La locution signifie littéralement « se quereller au sujet d’un partage impossible ». Cette notion de « diviser » a donné, par dérivation, le sens de « se…

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Démasqué

Le mot masque est un emprunt à l’italien maschera « faux visage », d’un radical préroman maska signifiant « noir »et « sorcière ». Il apparaît en français à la Renaissance (1514) avec le sens italien de « faux visage que l’on met pour se déguiser ». Déguisement facial qui connotera les plaisirs mondains et érotiques de la haute société un siècle plus tard, à l’époque classique. De nos jours, il décrit un objet souple ou rigide couvrant le visage, d’apparence humaine, animale ou imaginaire, à fonction expressive, festive ou magico-religieuse et possédant souvent une…

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Sortir du nid

Nid est issu du latin nidus dont la racine indoeuropéenne ni-zdo- se manifeste dans diverses langues notamment l’anglais nest, l’arménien nist et le sanskrit nidah. Le mot a le sens d’« abri construit par les oiseaux ». Par extension, il désigne le lieu où logent différents animaux et insectes: nid de souris, nid de guêpes; puis, par métaphore, les occupants du nid, la nichée. Son sens s’étend à l’« habitation de l’homme dans son aspect d’intimité »: nid d’amour. Au figuré, il désigne un endroit où se trouvent rassemblées plusieurs personnes ou…

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Fête des Mères

Le mot mère est issu du latin mater « femme qui a mis un enfant au monde ». Mater vient lui-même d’une famille de langues indo-européennes antérieures au latin. Ce qui explique les étonnantes similitudes de l’étymon chez plusieurs langues vivantes ou éteintes de même origine : l’anglais mother, l’allemand Mutter, le sanskrit matar, le vieux celtique mathir, le gaélique écossais et l’irlandais màthair, l’afrikans et le néerlandais moeder, le lithuanien moti, l’italien et l’espagnol madre. En français, le mot désigne une femme qui donne la vie, élève ou a élevé…

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Sauter dans l’arène

Arène, du latin arena « sable », semble, de par sa finale, être d’origine étrusque, ou très certainement autochtone de l’Italie. Le mot désigne l’aire sablée d’un amphithéâtre, d’un cirque, le lieu de combat des gladiateurs. Dans la langue classique, il est un synonyme noble de sable, plutôt réservé à la poésie : « J’aime mieux un ruisseau qui, sur la molle arène, En un pré plein de fleurs lentement se promène.» (Boileau) Au figuré, il désigne un espace de débat d’idées: arène politique. L’accentuation du /e/ donne aréna, un québécisme issu de…

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Rien à branler

Branler est issu, par contraction, du verbe brandeler qui, au 11e siècle, signifiait « vaciller, osciller ». Il partage le même radical bran- que brandir dans un contexte guerrier, son sens premier étant « secouer, agiter une arme. » Il prend la valeur plus générale d’« agiter, remuer en balançant »: branler la tête. Au 16e siècle, une réalisation particulière de ce sens correspond, dans la langue vulgaire, à « masturber », acception devenue usuelle aussi à la forme pronominale: se branler. Au figuré, branler signifie « manquer de stabilité, de…

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Le roi de la poutine

La poutine est un plat composé de frites et de fromage en grains nappés d’une sauce brune. L’origine du mot est incertaine. Il pourrait s’agir d’un emprunt à l’anglais pudding qui a, par ailleurs, pénétré tel quel en français québécois. Il pourrait aussi s’agir d’un héritage des parlers de France. En dauphinois, on relève poutingo « marmelade de prunes cuites au four »; en provençal on retrouve poutino « purée ». Potin est un « pâté » en normand, poutis une « purée épaisse » en bourguignon et poutiengo une « chose…

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Il faut savoir

Le verbe savoir est issu du latin populaire sapēre, altération du latin classique sapĕre, « avoir de la saveur », d’où « avoir de la pénétration », puis « comprendre ». Il revêt le sens général de « connaitre », avoir la révélation de l’existence, de la réalité, de l’identité, de la vérité, avoir présent à l’esprit un ensemble de connaissances, de concepts, d’idées, d’images, de représentations, acquises par l’expérience, l’étude et la réflexion : savoir des choses, savoir d’avance, savoir avec certitude, en savoir long, tout savoir. L’accent peut être mis sur…

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Ma cabane au Canada

Le mot cabane est emprunté au provençal cabana « maisonnette ». Il désigne une construction rudimentaire de petite dimension. Il a acquis des emplois particuliers en fonction de l’utilisation de l’objet, « abri pour animaux », « abri de haute montagne ». Sucre est un emprunt à l’italien zucchero, pris à l’arabe sukkar, mais d’origine indienne, le mot s’écrivant çârkara en sanskrit. Le sucre, qui vient en effet de l’Inde, a été introduit en Grèce au 1er siècle apr. J.-C., d’où le grec sakkharon et le latin saccharum. Les Arabes cultivèrent…

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Clins d’œil

Œil est issu du latin oculus « organe de la vue », qui a pour correspondant le grec ophtalmos. En ancien français, par formation populaire, il adopte diverses orthographes. Au singulier: ol, oil, uel, ueil, oeuil. Le pluriel se notant avec plus de variantes encore: olz, oilz, ialz, iauz, ieus, ieux, ieuz, yeus, yeulx. Le mot désigne, comme en latin, l’organe de la vue: globe de l’œil, blanc de l’œil. Et un élément du visage: œil injecté de sang, yeux bridés. Symbole de vision, d’attention, de perspicacité, de vigilance, de…

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Enlever une pelure

Peler est issu du bas latin pilare, dérivé de pilus qui désignait le poil ou le cheveu. Le sens premier du verbe est « ôter les poils, poiler le cuir ». Par étymologie seconde, il est associé à l’ancien français pel « peau », développant le sens de « ôter la peau » et, par extension, « enlever l’enveloppe d’un végétal ou de quelque chose ». Dès le 12e siècle, il prend le sens figuré de « dépouiller ». L’adjectif pelé, tiré du participe passé, est substantivé au sens ancien de « chauve »;…

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Sapiens : Une brève histoire de l’humanité

Un livre de Yuval Noah Harari, publié pour la première fois en hébreu en 2011; traduit en français en 2015. Ouvrage de 500 pages que j’ai abondamment annoté. Inutile d’en livrer des extraits comme pour les romans que j’ai lus; il y en aurait trop. Alors, faudra synthétiser sans trop dénaturer, j’espère, les propos de l’auteur. Et vous les présenter par grands chapitres. Je commence par le commencement comme les religieuses me l’ont enseigné à l’école.   Introduction C’est l’histoire, comprends-tu, d’un animal insignifiant: l’Homo sapiens « homme sage ».…

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Mon oncle d’Armorique

La langue bretonne fait partie du groupe des langues celtiques de la branche brittonique, avec le gallois et le cornique. C’est entre 450 et la fin du 7e siècle que des populations chassées de leur île, la « grande Bretagne », s’implantèrent en Armorique, patrie d’Astérix, formant aujourd’hui la Bretagne française. Le breton, formé de quatre variétés – cornouaillais, léonais, trégorrois et vannetais – est l’une de ces langues minoritaires non issues du latin qui survécurent à la périphérie du territoire français; le basque, le flamand, le lorrain et l’alsacien…

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Congé de Pâques

Pâques est issu du latin chrétien pascha, emprunté au grec paskha, lui-même pris, par l’intermédiaire de l’araméen pashã, à l’hébreu biblique pèsah, « passage ». La pâque désigne la fête judaïque. Pâques, par ellipse pour jour de Pâques, évoque la fête chrétienne, célébrée chaque année le premier dimanche suivant la pleine lune de l’équinoxe de printemps, pour commémorer la résurrection du Christ. Malgré le /s/ final, Pâques est masculin singulier mais, accompagné d’un adjectif, il devient féminin pluriel: Joyeuses Pâques. Par métonymie, le mot désigne le fait de communier pendant…

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Poisson d’avril

Poisson est issu du latin piscis et désigne tout animal aquatique à corps fusiforme. Puis il est employé dans le contexte de nourriture, « du poisson », par opposition à « viande ». Au 15e siècle, la locution poisson d’avril a d’abord le sens figuré d’« intermédiaire, jeune garçon chargé de porter les lettres d’amour de son maître », le début du printemps étant propice aux amours illégitimes. Le sens moderne de « plaisanterie », attrape qui se fait traditionnellement le 1er avril, s’est implanté avec une coutume qui remonte à la fin…

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Notre Grand-Mère la Lune

À 75 ans, Qaletaqa « Gardien » était l’homme le plus sage de la tribu mojave. Il s’était habitué à ce nom, bien qu’il préféra celui que se donnaient ses ancêtres, Pipa a’ha macave, « le peuple qui vit près de l’eau ». Le grand fleuve Colorado. Mais c’était avant que les Blancs ne confisquent leurs meilleures terres, ne leur laissant que de vastes étendues désertiques; au Sud de la Californie, en Arizona et au Nevada. Chaque année, Qaletaqa recevait des visiteurs venant de tribus voisines, qui parlaient diverses langues yumanes.…

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Savez-vous planter des choux?

En latin, planta désigne primitivement la plante du pied. Le verbe plantare, devenu planter, signifie d’abord « enfoncer en terre avec le pied ». Cette technique de plantation, décrite dans la chanson Savez-vous planter les choux?, consiste à creuser dans le sol avec le pied le trou qui doit recevoir la jeune pousse, autour de laquelle la terre est ensuite ramenée et tassée par ce même pied. Les adeptes du jardinage savent bien que le pied a toujours son usage en horticulture. Mais dans les langues romanes, la référence au…

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Après-concile

Concile est issu du latin concilium « convocation » et « assemblée délibérante ». En latin chrétien, il développe le sens de « réunion des évêques de l’Église catholique, légitimement convoquée pour statuer sur des questions de dogme, de morale ou de discipline »: Conseil œcuménique. Au pluriel, il décrit les décrets et canons de ces assemblées: recueil des conciles. L’ancien français, celui du 14e siècle, donnait au mot la valeur dérivée de « conversation entre personnes » et « diffusion d’une nouvelle ». Sens laïque conservé en français moderne,…

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Couvre-chef

Chef est issu du latin classique caput qui désigne la tête des hommes et des animaux. L’évolution du mot en italien, capo, en espagnol et en portugais, cabo, est moins sentie qu’en français. Ce sens de « tête » est concurrencé puis éclipsé par testa « crâne ». Au 17e siècle, il ne subsiste que dans le composé couvre-chef « qui couvre la tête, chapeau ». Le mot évoque aussi le sommet, la source, la pointe dans une acception géographique de cap. ll prend le sens imagé de celui qui est à…

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Porter la moustache

On peut la porter, la tailler, la tortiller, la retrousser, la lisser, la cirer, la couper. Elle pousse par paire, rugueuse, hérissée, frisée, tombante, à la gauloise, à la tartare, à l’impériale, en brosse, en croc. La moustache est la partie du système pileux qui garnit la lèvre supérieure de l’homme. Le mot, issu du grec byzantin mustakhion, est emprunté au napolitain mustaccio, correspondant à l’italien mostaccio « museau », « visage ». Il est usité au singulier comme au pluriel. Par analogie, moustache désigne les grandes soies tactiles que de nombreux…

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Pour un flirt

Flirter, « avoir un flirt avec quelqu’un », est la francisation du verbe anglais to flirt « s’agiter », puis « folâtrer », qui a été rattaché au moyen français fleureter « voler de fleur en fleur, faire la cour ». L’expression galante conter fleurette date du 17e siècle. Flirter prend, au figuré, le sens de « se rapprocher d’adversaires politiques ou idéologiques ». Au Québec, on l’emploie dans le sens de « caresser l’idée », un calque de l’anglais to flirt with an idea. En français standard, flirt, de l’anglais flirt, désigne une amourette, une…

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Aller tout croche

Croc est issu du francique krok « crochet ». Les dérivés sont nombreux: crocheter, crochetage, crocheteur, crocher, croc-en-jambe, accrocher, accrochement, accroc, accroche, accrochage, accrocheur, accroche-cœur, raccrocher, raccrocheur, raccrochage, décrocher, décrochage, décrocheur, anicroche, escroc, recroqueviller. Féminin, croche désigne les tenailles du forgeron, puis la note de musique dont la queue porte un crochet. Adjectif, il décrit ce qui est recourbé en forme de crochet: nez croche, doigts croches; et, au figuré, une personne malhonnête, un être avide et rapace. Son synonyme crochu l’a supplanté en français standard. Au Québec, croche est…

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On achève bien les chevals

La formation des pluriels en –aux est très ancienne. Elle semble remonter au 7e siècle, traversant différents stades sur le plan de la graphie et de la prononciation : chevals, chevaus, chevax, chevaux. Pour comprendre comment on a pu passer de –als, pluriel de chevals, où la voyelle /a/ et les deux consonnes /l/ et /s/ étaient prononcées, à la succession –aux de chevaux qu’aujourd’hui nous prononçons /o/, il faut savoir qu’à l’époque de la formation de la langue française, l’articulation du /l/ était teintée, devant une voyelle, d’un écho…

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La belle lurette

« Je ne suis certainement pas doué pour la parole. C’est peut-être pourquoi je me suis mis à écrire. » (Henri Calet, 1904-1956) Son premier roman, Calet le publie en 1935: La belle lurette. C’est l’histoire, comprends-tu, en grande partie, de l’auteur lui-même, né début 1900, qui passe son enfance à Paris et son adolescence à Bruxelles. Parmi les petites gens, marchands à la sauvette, pâles putains, pouilleux, ivrognes, insoumis. Êtres fragiles et marginalisés. Vivant le présent dans l’inquiétude. L’écrivain les décrit avec humanité et indulgence car il les a…

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Bouillon de culture

Le mot culture est issu du latin cultura « action de cultiver la terre » et, au figuré, « action d’éduquer l’esprit ». En vieux français, il s’écrit couture, une forme conservée en France dans quelques parlers septentrionaux et en Normandie où il a fourni les noms de famille Couture et Lacouture. Par extension, le mot décrit l’action de tirer du sol les végétaux utiles à l’homme: agriculture; et, ultérieurement, l’élevage de certains animaux: culture des huîtres; puis l’action de faire croître des micro-organismes en milieu approprié: culture in vitro.…

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Au revoir, Minou noir

Minou noir est mort. À seize ans. Pas à un âge de patriarche, juste de vieux minou. Une amie de ma deuxième fille, Hervée, lorsqu’elle était au primaire, nous l’avait confié en adoption. Né dans une ruelle, il était le seul, parmi nos quatre chats, qui allait dehors. Un besoin irrépressible. Au point, l’été, de défoncer les moustiquaires pour sortir prendre l’air et se coltailler avec les autres chats du voisinage. Il avait d’ailleurs perdu un bout d’oreille durant l’une de ces rixes. Je n’ose imaginer quel bout manquait aux…

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Vraie bargaine

Barguigner, attesté en latin médiéval sous la forme barcaniare, « faire du commerce », est un emprunt au francique borganjan, formé au 12e siècle du croisement de borgen « prêter, emprunter », encore vivant en allemand contemporain, et waidanjan « gagner ». Dans son acception première, le verbe signifie « marchander longuement » mais par référence à la durée de certains marchandages, il prend le sens d’« hésiter » ou « avoir de la peine à déterminer », particulièrement quand il s’agit d’un achat, d’une affaire, d’un traité. Ce sens a survécu dans…

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Les mots pour le dire

Dire est issu du latin dicere. Sa valeur principale équivaut à « parler » mais le mot prend très tôt de nombreux sens particuliers correspondant à confirmer, affirmer, soutenir, exposer, conter, appeler, nommer, réciter. De nos jours, sa liste de substituts est incroyablement abondante. Ainsi, au lieu de dire, on peut, « comme un humain »: crier, s’écrier, hurler, brailler, éructer, vociférer, s’égosiller; ou « comme un animal »: rugir, mugir, meugler, aboyer, miauler, glapir, glousser, gronder, coasser, croasser, chuinter, hululer. On peut « faire un bruit d’instrument »: claironner,…

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Chasse à l’orignal

L’orignal est ce cervidé d’Amérique du Nord, de grande taille, à pelage brun, pourvu de longues pattes robustes, de hautes épaules surmontées d’une bosse et, chez le mâle, de larges bois plats et palmés. Son nom est l’altération de orignac, une variante ancienne, empruntée au basque oregnac, pluriel de orein « cerf », un mot appris des pêcheurs et émigrés basques venus en Nouvelle-France. L’émergence de la forme « orignal » au détriment de « orignac » s’explique par le fait qu’au 17e siècle les finales –ac et –al étaient souvent confondues.…

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