« L’éternité c’est long, surtout vers la fin. » (Woody Allen).
Éternel, d’abord eternal, vient du latin chrétien aeternalis « qui est hors du temps, sans commencement ni fin », dérivé du latin classique aeternus, formé lui-même sur la forme archaïque aeviternus « qui dure toute la vie », opposé à mortalis. Sa graphie actuelle est attestée depuis le 13e siècle.
En français, l’adjectif s’attache d’abord à ce qui tient à la nature de Dieu : Père éternel, devant l’Éternel, Royaume éternel. À l’existence perpétuelle après la mort, conception métaphysique pour ses disciples : salut éternel, repos éternel, vie éternelle; ou pour ceux qui ont méprisé ses commandements, pêcheurs sans foi ni loi : damnation éternelle, flammes éternelles.
Par affaiblissement de sens, il s’applique à ce qui dure très longtemps : ville éternelle, Rome, neiges éternelles. « Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux rivages, Dans la nuit éternelle emportés sans retour, Ne pourrons-nous jamais sur l’océan des âges, Jeter l’ancre un seul jour? » (Alphonse de Lamartine, Méditations poétiques, 1820). À ce qui est de tous les temps : éternel féminin, les caractères supposés immuables de la psychologie féminine. À ce dont on n’entrevoit pas la fin : amitié éternelle, reconnaissance éternelle. Ce qui se répète continuellement, ce qui est toujours dans le même état : éternelle chanson du vent, éternelle sérénité, éternel mécontent. « Tout en haut de Tanger, il y avait une maison jaune à un étage d’où l’on voyait le scintillement éternel de la mer. » (Jean-Paul Sartre, Le Sursis,1945). Mais aussi ce qui fatigue, qui ennuie par sa longueur, pour sa répétition, son caractère pénible ou monotone : éternel bavard, éternelles explications, éternelles récriminations. Ce qui est habituellement associé à quelque chose ou à quelqu’un : son éternel chapeau.
Le principal dérivé, éternité, reprend les mêmes valeurs que l’adjectif : éternité bienheureuse ou malheureuse, éternité de béatitude, éternité de l’âme. Par extension, il décrit la gloire durable dévolue à un héros, un chef, un grand artiste : entrer dans l’éternité, de toute éternité. L’expérience subjective de l’infini dans un instant: minute d’éternité. Ou au contraire, tuer le temps à ne rien faire, avec lenteur, avec langueur, sans insulter l’éternité. Les deux autres dérivés sont éternellement et éterniser « prolonger indéfiniment », « faire traîner en longueur » : éterniser une discussion, éterniser une capsule linguistique!
Devoir
Thème ancien, l’éternité se révèle sous d’autres formes qui s’en approchent. Trouvez quels mots d’après leur définition.
D’une période antique, révolue. | Arc _ _ _ _ _ _ |
Démodé, qui n’est plus en usage. | Dés _ _ _ |
Qui est si ancien que son origine est inconnue. | Imm _ _ _ _ _ _ _ |
Temps terminé. | Rév _ _ _ |
Qui a existé pendant plusieurs siècles. | Séc _ _ _ _ _ _ |
Réponse
D’une période antique, révolue. | Archaïque |
Démodé, qui n’est plus en usage. | Désuet |
Qui est si ancien que son origine est inconnue. | Immémorial |
Temps terminé. | Révolu |
Qui a existé pendant plusieurs siècles. | Séculaire |
Et dans des expressions vieilles comme le monde. Au 17e siècle, être vieux comme les rues, ne plus être à la mode. Du temps qu’on se mouchait sur la manche, « que le monde estoit encore simple, il y a fort long temps ». Au 18e siècle, remonter le déluge. Au 19e siècle, resucé, de la troisième resucée, « flétri par l’usage, fané, usé » , par allusion au bâton de sucre d’orge que se repassent plusieurs gamins. Au 20e siècle, vieux comme mes robes, plaisanterie féminine par déformation de « vieux comme Hérode. »