La position centrale de la Bulgarie en Europe est propice aux influences linguistiques. Aussi la langue bulgare est-elle riche d’emprunts au français. Des calques comme vis-à-vis, tête-à-tête et rendez-vous. Proches par la sonorité : karaktercaractère, kurajcourage, tirbushontire-bouchon, sekretarsecrétaire, trotoartrottoir. Madama désigne une femme ou une fille et maman, une mère. Les guerres napoléoniennes ont laissé en Bulgarie une trace futile. Napoleonki « caleçon long » est formé d’après la culotte blanche, élément essentiel de la tenue de l’empereur des Français. Aujourd’hui, le mot est toujours vivant. Il décrit un vêtement porté par les soldats bulgares et les personnes âgées, proche, au Québec, des combines.
Au pays des mots, les rapprochements entre le français et l’anglais sont nombreux au cours des siècles, au fil des multiples traversées de la Manche, dans les deux sens. Le vieux français abandonne la consonne /s/ au 13e siècle lorsqu’elle est suivie d’une autre consonne dans la même syllabe : cust devient coût, coste devient côte, cloistre devient cloître. Mais l’anglais, qui emprunte au français des mots avec cette syllabe, préfèrent conserver la consonne /s/. C’est ainsi que ancestre en vieux français, ancêtre, devient ancestor en anglais. Oistre, huître en français moderne, devient oyster en anglais. Maistre au 13esiècle, maître, devient master en anglais.
« Le français parlé et le français écrit sont deux langues différentes » (Raymond Queneau, 1903-1976) Le français ne se fixe pas, il se dynamise. D’abord à l’oral, afin de produire des effets, comprendre, se faire comprendre, demander, requérir, rejeter, exprimer ce qu’on éprouve. Puis par l’écriture, ce dessin contraignant de la parole et de l’idée, qui porte en elle la rigueur des règles de syntaxe. Le décompte des fautes d’orthographe correspond aux difficultés dans le maniement d’un instrument complexe et évolutif, difficultés inévitables lorsque les utilisateurs de partout se mêlent et se multiplient. Ajustement normal et toujours à reprendre dans le contexte d’une langue vivante.
P’tit est la contraction de petit. Peu, c’est pas beaucoup mais, au Québec, c’est encore moins : p’tit peu. Le Québécois a un p’tit problème surtout quand il est gros. Il prend un p’tit coup, il apprécie une p’tite vite. Dans les Laurentides, il voyageait dans le P’tit train du Nord, comparé aux gros chars traversant le Canada. La chanson québécoise incontournable est Le P’tit Bonheur de Félix Leclerc, à laquelle fera écho, cinquante ans plus tard, la série-culte La P’tite Vie à la télévision. Inventaire auquel il faut ajouter le diminutif « Ti » pour les Ti-cul, Ti-pit, Ti-casse, Ti-boutte et Ti-coune, tous nés pour un p’tit pain.
Mme Cheval et M. Percheron, propriétaires d’une boucherie chevaline, ont inauguré une statue équestre lors d’un concours hippique. Cheval possède trois étymons. Le latin populaire caballus s’est largement imposé en fournissant au français chevalier, chevalerie, chevalet, chevauchée, chevalin. Et les locutions cheval de bataille, cheval de bois, cheval de Troie, à cheval sur les principes, monter sur ses grands chevaux. Le latin classique equus a fourni équidés, famille à laquelle appartient le cheval, équitation et équestre. Le grec hippikos, « relatif aux chevaux », a formé hippodrome, hippomobile, hippocampe, hippogriffe, créature imaginaire qui ressemble à un cheval ailé avec la tête d’un aigle et hippopotame « cheval du fleuve. »