Langage des fleurs

« Papillon, ce billet doux plié cherche une adresse de fleur. » (Jules Renard, 1864-1910).

Leurs jardins sont aussi anciens que les carrés de légumes. Et dans toutes les régions du monde, sa culture dépasse toute finalité pratique et économique, se chargeant plutôt de revêtir des valeurs symboliques liées à sa forme, sa couleur, son parfum : la fleur.

Le mot vient du latin florem, accusatif de flos, floris « fleur » et, par analogie, « partie la meilleure de quelque chose », la fleur étant la sommité de la tige.

Le français reprend les sens du latin au 11e siècle, d’abord sous les formes flor, flur puis adopte sa graphie actuelle au siècle suivant. Il désigne la partie de certains végétaux contenant les organes reproducteurs, souvent odorante et ornée de couleurs vives ainsi que le rameau qui la porte que l’on cultive pour l’agrément : parterre de fleurs, pot de fleurs, marché aux fleurs, bouquet de fleurs, fleurs printanières, pétales de fleur, fleurs vivaces, les « immortelles », fleur d’oranger, fleur de la passion ou passiflore, une plante grimpante qui offre une floraison exotique et une beauté exquise.

Le mot évoque leur reproduction ou leur représentation symbolique : fleur artificielle, fleurs en papier, tissu à fleurs, fleur de lis, emblème de la royauté en France à partir du 12siècle, fleurs séchées qui contribuent aux souvenirs affectifs. Au figuré, il décrit l’époque où les personnes et les choses se trouvent dans toute leur beauté ou leur plénitude, brillent de tout leur éclat… avant le début du déclin : à fleur de peau, sensibilité très grande, qui réagit à la plus petite excitation, vive mais superficielle; fine fleur, ce qui est considéré comme le meilleur ou le plus distingué dans un groupe ou un ensemble, fine fleur de la chevalerie, en fleur(s), dans tout son éclat, dans sa fraîcheur, jeunes filles en fleur, fleur de l’âge. Les compliments conventionnels ou poétiques du style, du discours : fleurs de rhétorique.

Les locutions anciennes ou modernes revêtent ses diverses valeurs  : fleur bleue, d’une sentimentalité un peu mièvre et romanesque, le bleu pâle exprimant la tendresse dans le langage des fleurs; fleur de macadam, « prostituée »; comme une fleur, de manière douce, ingénument; faire une fleur, accorder une faveur, un avantage, une préférence, couvrir de fleurs, jeter des fleurs, pour décrire les louanges décernés à quelqu’un oralement ou par écrit; fleur de Marie, évoque la virginité féminine par allusion à l’Immaculée; qui peint la fleur n’en peut peindre l’odeur, telle une fleur riche en couleurs, mais dépourvue de parfum, sont les belles paroles de celui qui agit en hypocrite; prière de n’envoyer ni fleurs ni couronnes, dans un faire-part de décès.

Les dérivés foisonnent parmi lesquels : fleurette encore vivant dans l’expression conter fleurette; fleureter, d’abord « voler de fleur en fleur » au 16e siècle, puis « faire la cour » aujourd’hui, proche de l’anglais to flirt; fleurir, fleuriste, fleurissant, fleurissement, fleurer, fleurage, fleuron, fleuronné, défleurir, refleurir; fleuret, terme d’escrime, à cause du bouton de cette arme comparé à celui d’une fleur; fleurettiste, fleurettisme, floral, florir, floraison, florissant, florissante, enfleurer, efflorescence.

 

Devoir

Trouvez trois autres dérivés de fleur d’après leur définition.

Émerger, poindre, sortir. Aff _ _ _ _ _ _
Faire perdre sa virginité. Déf _ _ _ _ _
Toucher légèrement, frôler. Eff _ _ _ _ _ _

Réponse

 

Émerger, poindre, sortir. Affleurer
Faire perdre sa virginité. Déflorer
Toucher légèrement, frôler. Effleurer

 

Affleurer qui a produit affleurement. Les rochers affleuraient à la surface de l’eau.

Déflorer. Au 19e siècle, faire perdre à une jeune fille la fleur de sa virginité. Ce qui n’était pas de tout repos : « … j’admire les romanciers qui font déflorer des vierges harnachées dans des robes, sanglées dans des corsets, et cela, naturellement, en un tour de baiser, en un clin d’œil, comme si c’était possible! Quel ennui tout de même que de se battre avec ces affutiaux, que d’errer dans les plis à empois du linge! » (Joris-Karl Huysmans, Là-bas, 1891).

Effleurer. Au figuré, le verbe signifie toucher à peine, examiner superficiellement un sujet.