La délicatesse

C’est l’histoire, comprends-tu, de François qui rencontre Nathalie. S’ensuit une belle histoire d’amour mais François meurt frappé par une auto en faisant du jogging. Il aurait pu aussi bien mourir frappé par un camion de vidanges en sortant ses ordures, comme ça pourrait m’arriver chaque vendredi matin quand je dépose mes sacs verts sur le trottoir, le danger nous guette à chaque instant, mais non le choix de l’auteur est qu’il meure frappé par une voiture. Nathalie est complètement dévastée et déstabilisée. Puis, trois ans plus tard, elle rencontre Markus, un gars moins jeune que François, moins beau que François, moins sexy que François, pas du tout le même type que François. Et pourtant ils tombent amoureux.

En voici des bouts que j’ai annotés dans le roman. Ça vous donnera peut-être le goût de le lire:

(Nathalie et François, nouvellement mariés après de courtes fréquentations. Bien sûr, ils avaient déjà consommé l’acte de chair)

François était dans une énergie folle, un appétit démesuré de jouissance. Seulement, au moment de la pénétrer, il se sentit paralysé. Une angoisse qui aurait pu s’apparenter à la peur d’un bonheur trop vif. « Que se passe-t-il? »,lui demanda-t-elle. « Rien… rien… c’est juste la première fois que je fais l’amour à une femme mariée.

(Nathalie apprenant la mort de François, se réfugie dans la maison de sa grand-mère qui l’a élevée)

Elle prit deux cachets et tomba sur son lit. Dans la chambre, celle de son enfance. Ce matin encore, elle était une femme. Et elle s’endormait maintenant comme une petite fille.

(À l’enterrement de François où se trouvent plusieurs personnes qui ont aussi assisté au mariage de Nathalie)

Ils sont tous là. Quelques années après, on se retrouve, et certains sont sûrement habillés de la même façon. Ont ressorti leur unique costume sombre, valable aussi bien pour le bonheur que pour le malheur.

(Quand Nathalie embrasse sur un coup de tête, les hormones sans doute, Markus, son collègue de travail suédois, un type hyper-drabe, qui est complètement chaviré par ce geste)

Le lendemain matin, il se réveilla très tôt. Si tôt qu’il n’était même pas certain d’avoir dormi. Il attendait le soleil avec impatience, comme un rendez-vous important.

(Markus ne sachant plus quoi faire, choisit de faire un peu de lecture)

Il se décida pour Syllogismes de l’amertume. (Je vous ai prévenus qu’il était drabe)

(Markus embrasse Nathalie à son tour, aussi impétueusement et aussi brusquement qu’elle l’avait fait avec lui. Réaction de Nathalie, une fort belle femme dans le roman comparativement à Markus le pas de classe)

Elle avait ressenti quelque chose de compliqué à définir. À vrai dire, c’était la première fois depuis trois ans qu’on l’agrippait ainsi. Qu’on ne la prenait pas pour une chose fragile.

(Markus, prenant son courage à deux mains, invite Nathalie au resto. Elle accepte.)

Il pensa qu’il ne l’avait jamais vue le soir. Il était presque étonné qu’elle puisse exister à cette heure-ci.

(Markus, fou comme de la marde, après sa soirée avec Nathalie)

Dans son lit, il sut qu’il ne serait pas capable de s’endormir: comment aller vers le rêve quand on vient de le quitter?

(Nathalie qui apprécie de plus en plus Markus parce qu’il reste lui-même)

Elle passa voir Markus, et fut surprise de constater qu’il avait la même tête que la veille. Une sorte de force tranquille de l’identique.

(Markus qui a la chienne de tomber amoureux de Nathalie vu que tout le monde pense qu’ils ne sont pas du tout faits l’un pour l’autre mais qui ne veut pas laisser passer sa chance.)

Il pensa surtout qu’il ne devait pas avoir peur, qu’il était ridicule de reculer ainsi, de se protéger. On ne devrait jamais faire l’économie d’une douleur potentielle.

(Quand, ENFIN, Markus couche avec Nathalie)

Elle guidait Markus, qui la suivait, la tenant par les hanches. C’était l’obscurité la plus lumineuse de sa vie.

Nathalie posa les bougies sur la table de chevet. Ils se retrouvèrent, face à face, dans le mouvement émouvant des ombres.

Elle était nue, collée contre lui. Son émotion (à Markus) était si forte que ses mouvements ralentirent. Il se laissait grignoter par l’immense appréhension, devenait brouillon. Elle aima ces instants où il était maladroit, où il hésitait. Elle comprenait qu’elle avait voulu cela plus que tout, retrouver les hommes par un homme qui ne soit pas forcément un habitué des femmes. Qu’ils redécouvrent ensemble le mode d’emploi de la tendresse.

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