« Le bonheur, c’est 40 % physique et 80 % mental. »
Il est où le bonheur, il est où? Il résulte simplement de la fusion de bon et heur. Heur étant issu par évolution phonétique du latin classique augurium « présage »; favorable comme bonheur, mauvais comme malheur.
En français du 12e siècle, le mot est attesté au sens de « fatalité heureuse », bonne fortune, chance favorable, occasion propice, événement propre à apporter quelque satisfaction : par bonheur, porte-bonheur, marchand de bonheur, au petit bonheur : « Le reste se casa où il put, les femmes sur les genoux des hommes et les hommes au petit bonheur, au hasard des angles de tables et des bouts de bancs restés libres. » (Georges Courteline, Messieurs-les-Ronds-de-cuir,1893).
Au sens large, il décrit un état essentiellement moral atteint généralement par l’être humain lorsqu’il a obtenu tout ce qui lui paraît bon et qu’il a pu satisfaire pleinement ses désirs, accomplir totalement ses diverses aspirations, trouver l’équilibre dans l’épanouissement harmonieux de sa personnalité. Associé à une idée de continuité, de croissance et d’accomplissement mais envisagé aussi comme un plaisir très bref : croire au bonheur, bonheur éternel, bonheur véritable, bonheur conjugal, au comble du bonheur, instant de bonheur, éclairs de bonheur. « Les plus puissants (des souvenirs) sont ces moments de bonheur inouï qui éclatent dans la vie comme un incendie, qui l’éclairent et la brûlent durant quelques heures, et qui, lorsqu’ils sont éteints, se représentent à nous affranchis de tous soins endurés pour les obtenir, libres de tout désespoir de les avoir perdus. » (Frédéric Soulié, Les Mémoires du diable,1837).
Avec des réserves soulignées dans des proverbes : L’argent ne fait pas le bonheur, avoir de l’argent n’est pas une garantie pour être heureux. Le malheur des uns fait le bonheur des autres, un même événement peut être fâcheux pour les uns et avantageux pour les autres. Et une chanson :
C’était un petit bonheur que j’avais ramassé
Il était tout en pleurs sur le bord d’un fossé
Quand il m’a vu passer, il s’est mis à crier
Monsieur ramassez-moi, chez vous emmenez-moi
Mes frères m’ont oublié, je suis tombé, je suis malade
Si vous n’me cueillez point, je vais mourir quelle balade
Je me ferai petit, tendre et soumis, je vous le jure
Monsieur, je vous en prie, délivrez-moi de ma torture
J’ai pris le petit bonheur l’ai mis sous mes haillons
J’ai dit, faut pas qu’il meure, viens-t‘en dans ma maison
Alors le petit bonheur a fait sa guérison
Sur le bord de mon cœur y avait une chanson
Mes jours, mes nuits, mes deuils, mes peines, mon mal, tout fut oublié
Ma vie de désœuvré j’avais l’dégoût d’la recommencer
Quand il pleuvait dehors ou qu’mes amis m’faisaient des peines
J’prenais mon petit bonheur et j’lui disais, c’est toi ma reine
Mon bonheur a fleuri, il a fait des bourgeons
C’était le paradis, ça s’voyait sur mon front
Or un matin joli que j’sifflais ce refrain
Mon bonheur est parti sans me donner la main
J’eus beau le supplier, le cajoler, lui faire des scènes
Lui montrer le grand trou qu’il me faisait au fond du cœur
Il s’en allait toujours la tête haute sans joie, sans haine
Comme s’il ne pouvait plus voir le soleil dans ma demeure
J’ai bien pensé mourir de chagrin et d’ennui
J’avais cessé de rire, c’était toujours la nuit
Il me restait l’oubli, il me restait l’mépris
Enfin que j’me suis dit, il me reste la vie
J’ai repris mon bâton, mes deuils, mes peines, et mes guenilles
Et je bats la semelle dans des pays de malheureux
Aujourd’hui quand je vois une fontaine ou une fille
Je fais un grand détour ou bien je me ferme les yeux
Je fais un grand détour ou bien je me ferme les yeux.
(Félix Leclerc, chanson Le P’tit bonheur, 1948).
Devoir
Les formules qui évoquent le bonheur, la félicité, l’enchantement, l’euphorie, le ravissement, l’extase, le contentement, la béatitude, le bien-être, sont nombreuses. Trouvez les douze suivantes en complétant chaque expression. Pour certaines, ce sera difficile si votre généalogie ou votre intérêt pour le bonheur ne remontent pas jusqu’au 15e siècle!
Ça bai _ _ _ .
Ça ro _ _ _ .
Être au septième c _ _ _ .
Être bien dans sa p _ _ _ .
Heureux comme un po _ _ _ _ _ dans l’eau.
Mordre à la gra _ _ _ .
Ne plus se sentir pis _ _ _ .
Prendre son p _ _ _ .
Reposer son hum _ _ _ _ _ .
Se la couler d _ _ _ _ .
Tout est pour le mieux dans le meilleur des m _ _ _ _ _.
Voir la vie en r _ _ _ .
Réponse
Ça baigne.
Ça roule.
Être au septième ciel. Quatre étages plus haut que l’expression du 15e siècle « être au troisième ciel », soit encore plus proche du paradis.
Être bien dans sa peau.
Heureux comme un poisson dans l’eau.
Mordre à la grappe. Au 17e siècle, « saisir avec empressement une proposition, croire aveuglément à une promesse. »
Ne plus se sentir pisser. Au 19e siècle, « être extrêmement content de soi-même. »
Prendre son pied ou C’est le pied! Exclamation vedette en 1968 et des années suivantes pour exprimer une satisfaction sexuelle ou d’un autre ordre.
Reposer son humanité. Par raillerie au 17e siècle, « se mettre à son aise, chercher ses commodités. »
Se la couler douce.
Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Voir la vie en rose.