C’était samedi. L’homme me faisait dos chez Métro dans l’allée des fruits, précisément devant le comptoir des bananes. J’ai d’abord vu son manteau mais pas la tête. J’ai trouvé curieux qu’un manteau puisse posséder des jambes et des mains poussant un chariot d’épicerie mais pas de tête. Puis, en me tassant, j’ai su que c’était un très vieux monsieur, approchant sans doute les 90 ans, dont la tête faisait presqu’un angle droit avec son cou. Comme si elle était devenue trop pesante à force d’avoir pensé toutes ces années.
Il ne regardait pas devant mais en bas. Je me suis dit qu’il ne pouvait acheter que des produits se situant sur les étagères inférieures comme les patates. Il ne pouvait donc voir que les fraises, placées sur les tablettes du haut, étaient en vente cette semaine. Puis, c’est sorti tout seul: « Aimez-vous les fraises, monsieur, elles sont en vente, deux casseaux pour 6 $ ». Il m’a dit non en me remerciant.
Plus loin, je l’ai croisé de nouveau dans l’allée des produits congelés; il avait des patates dans son panier.