Un tête-à-tête si troublant

Très long résumé d’un roman Harlequin acheté à la pharmacie du coin. Le seul que j’ai lu de ma vie. C’était pour remonter le moral d’une amie qui filait un mauvais coton. Chaque matin, je lui ai envoyé le résumé d’un chapitre. Onze jours durant pour onze chapitres. Et cette femme radieuse a retrouvé le sourire.

Que retenir de cette histoire? Si votre moral est au plus bas, lisez un roman Harlequin. Mais ne me contactez surtout pas pour vous en faire le résumé.

Chapitre 1

C’est l’histoire, comprends-tu, d’Éleanor, une journaliste qui souhaite faire un reportage sur Alexei Drakos, un jeune, beau, mystérieux et athlétique milliardaire grec, superbe spécimen de la gent masculine au sourire dévastateur, qui possède une île à lui tout seul où il vit plutôt cloîtré et qui déteste les journalistes. Éleanor reçoit la commande formelle de son éditeur sinon il la met dehors : obtenir une entrevue avec Alexei. Quitte, lui dit-il, à t’habiller sexy. Elle trouve un prétexte, la traditionnelle danse du taureau sur l’île de Kyrkiros, qui appartient à Alexei, et une tenue un peu sexy, jean blanc serré et T-shirt noir décolleté assez bas qui met en évidence ses seins blancs et sa peau dorée. Elle débarque sur l’île, rencontre par hasard la mère d’Alexei, se met chum avec, rencontre ensuite le fils qui négocie pour elle, en grec, un collier, copie d’un ornement minoen, qu’elle trouvait trop cher et qu’il noue voluptueusement autour de son cou. Alexei apprend qu’elle est journaliste, le sourire d’Eleanor s’évanouit, Alexei lui sort une méchanceté, elle le trouve odieux. Puis, un terrible mugissement de taureau se fait entendre. Éleanor se crispe. Une créature mythique et cauchemardesque se jette sur elle. Mais non, il ne s’agit pas d’un rejeton du Minotaure mais d’un danseur avec une tête de taureau qui entame devant elle une danse sauvage et lubrique.

Est-ce que le danseur à tête de taureau écornera Eleanor la défigurant pour la vie?

Est-ce qu’Alexei, déjà amoureux, se jettera devant elle pour la protéger, se faisant déchirer sa chemise Giorgio Armani par les cornes du danseur à tête de taureau?

Est-ce que le danseur à tête de taureau est acoquiné avec Alexei pour qu’Éleanor ait peur et se jette dans ses bras, la rendant vulnérable à toute entreprise de séduction de la part du milliardaire?

Comme disait le Capitaine Bonhomme, c’est ce que vous saurez peut-être la prochaine fois.

 

Chapitre 2

Un nouvel acteur déguisé en Thésée s’interpose entre Éleanor et l’homme-taureau et, dans un ballet effréné, au rythme d’un tambour frénétique, l’abat d’un coup de hache. La bête s’écroule, Éléanor respire. À la fin du spectacle, Éleanor souhaite retourner à son hôtel. Talia, la mère d’Alexei, qui s’est prise d’amitié pour elle, l’accompagne jusqu’au ponton. Tout à coup, un sombre individu se jette sur Talia, la dépose sur son dos et se dirige vers une barque où l’attend  une autre fripouille. Éleanor se rue sur le brigand, lui mord le talon d’Achille, ultime référence au héros grec, et lui fout un coup de sac à dos derrière la tête; tiens mon estie! L’homme s’écroule abandonnant son fardeau, Talia. Mais il se relève, saisit Éléanor à la gorge et la précipite dans la mer. Elle sombre comme une pierre mais lutte désespérément pour sa vie. « Arrêtez, halète Alexei qui la tient dans ses bras musclés, toute trempée donc plus pesante, j’essaie de vous sauver ». Elle s’abandonne aussitôt dans le sommeil. À son réveil, Alexei est à  son chevet.  « Vous avez aidé ma mère à échapper à ses brigands. Toute ma vie, je vous en serai reconnaissant. » Sur ce, il lui sert une soupe aux lentilles (presqu’aussi bonne qu’une soupe Knorr). Talia revient. Elle explique à Éleanor pourquoi son fils déteste les journalistes. Son ancienne fiancée l’a calomnié ignominieusement au moment de leur séparation. «Toutes des salopes », aurait dit feu mon ami Yves Chagnon!  Soudain apparaît Milo Drakos, l’ex-mari de Talia et père d’Alexei dans un superbe costume de lin beige (il est très riche lui aussi comme tous les armateurs grecs). « Que fais-tu là, père? », semonce Alexei qui est en froid avec son père depuis la séparation de ses parents. « C’est ton anniversaire, il me semble », dit l’énigmatique patriarche.

Est-ce que Milo Drakos était le complice du malandrin qui a voulu enlever Talia parce qu’il voulait renouer avec son ex-femme à son corps défendant?

Est-ce que Éléanor aurait préféré qu’Alexei lui serve une soupe Knorr plutôt qu’une soupe aux lentilles?

Est-ce que le forban qui a voulu enlever Talia gardera le reste de sa vie une cicatrice au talon d’Achille qu’Éléanor lui a mordu avec férocité?

La réponse, dans le résumé du chapitre trois du roman.

 

Chapitre 3

Le lendemain, Eleanor se réveille raide et courbaturée. Pourtant elle n’a encore rien fait de sexuellement explicite avec Alexei ou sa mère. Un mot de Talia l’attend dans le plateau du petit déjeuner. « Chère amie, je dois retourner à Londres. Rappelez à mon fils qu’il vous doit une entrevue ». Déçue, elle s’habille, mange en vitesse, sort de sa chambre, demande au garde-côtes de la ramener à son hôtel sur l’île voisine de Karpyros.  On cogne vigoureusement à la porte de son studio. Elle ouvre. C’est Alexei. L’air furieux, il déclame: « Pourquoi ne pas m’avoir attendu? » « Je suis en vacances. Ja vais où je veux ». « Revenez avec moi. J’accepte de faire une entrevue avec vous. » Le jeu en vaut la chandelle pour Eleanor puisque cette entrevue pourrait la propulser sur une nouvelle orbite professionnelle. Juste au Québec, Châtelaine, Moi et Cie, TV Hebdo, Sélection du Reader’s Digest et Québec chasse et pêche pourraient diffuser ses reportages. Elle accompagne donc Alexei sur son île. Tout juste arrivée, elle prend une douche, met un jean propre. « Le jean vous va à ravir, lui dit-il d’un regard qui la trouble (imagine si elle était en babydoll). Le repas est servi. Alexi se détend et se confie. À l’Université Oxford où son père l’a inscrit et où étudient les princes héritiers de ce monde, il a eu du mal à se fondre à ce groupe sélect. Heureusement, il est entré dans l’équipe de cricket s’avérant être un excellent joueur, ce qui a facilité son intégration. Eleanor sent son coeur se serrer à l’idée de ce jeune homme privé de sa mère, de son père, de ses trois frères, de ses six soeurs, de son chien, de son majordome, de sa cuisinière, de son chalet dans le Nord, de son jet privé, en ce milieu austère où personne ne pense à s’amuser. « Dites-moi Alexei, à part moi, invitez-vous souvent des jeunes femmes sur votre île? »

Eleanor se dit-elle qu’en devenant la maîtresse d’Alexei, elle pourrait rencontrer et réaliser plein de reportages captivants avec tous ces princes du pouvoir?

Eleanor se demande-t-elle si elle a un déshabillé propre et sexy dans sa valise qu’elle pourrait revêtir sans que rien n’y paraisse au moment de prendre le dessert?

Après la consommation de l’acte sexuel, Eleanor songera-t-elle plutôt à poser du papier peint avec des motifs de pingouin dans la chambre de leur premier-né?

La réponse: dans le chapitre 4 du roman.

 

Chapitre 4

Tout à coup, être seule avec Alexei, cet homme beau, jeune, athlétique, séduisant, riche, respectueux des femmes et qui aime les chiens sur son île privée, terminant un repas somptueux, buvant une excellente bouteille de vin déplaît à Éleanor qui se sent à la merci de son hôte… Wow, là, chose. Qu’est-ce que tu veux de plus, crisse? Qu’il te masse les pieds? Qu’il te souffle à-travers ta blouse pour te réchauffer le dos? Qu’il fasse la vaisselle? Non mais non mais. Permettez-moi de faire cette petite crise de mâle irrité. D’abord, elle ressemble à quoi, Eleanor? Après 67 pages, le lecteur ignore encore de quoi elle a l’air. Est-ce une petite blonde, un peu cochonne, aux yeux bleus? Une grande brune aux formes pulpeuses? Une grassette, une starlette, un pichou, on ne sait jamais, tous les goûts sont dans la nature? Pis, madame se permet de faire la fine bouche. À la place d’Alexei, il y a longtemps que j’aurais pitchée Eleanor à l’eau (nage jusqu’à ton hôtel, ma belle), pis que j’aurais repris ma lecture du dernier roman de David Foenkinos, que je viens d’acheter.  Bref, il ne se passe rien d’intéressant dans la chapitre 4. Après le repas, Alexei montre à Eleanor son jardin secret dans un coin de son domaine, que des fleurs pas de légumes, la raccompagne à sa chambre, ferme la lumière du passage, rote, pète, se gratte le poil sous les aisselles, se brosse les dents pis il s’en va se coucher.

 

Chapitre 5

Eleanor frappe à la porte du bureau d’Alexei munie de son bloc-notes et de son stylo. Alexei consent à lui parler de sa carrière d’homme d’affaires et de quelques-unes des causes humanitaires qu’il soutient: la paix dans le monde, le sort des enfants-soldats en Afrique, la reconnaissance des droits des gais, la violence faite aux femmes, l’exploitation des personnes âgées, le contrôle des armes à feu, l’intimidation dans les écoles, la malbouffe dans les hôpitaux, l’augmentation du prix de l’essence en général et du carburant des jets privés en particulier. Après l’entrevue, Alexei décide de faire un peu de musculation. Il invite Eleanor à le suivre. Elle décline. Elle ne fait que du Pilates et préfère de toutes façons terminer son texte. Il la regarde taper à l’écran avec convoitise. Short serré, petits seins fermes, longues jambes, jolies fesses (enfin une description physique de la fille), il la détaille de son regard sombre où scintille une lueur troublante qui réveille son désir de la veille. Des mèches de cheveux châtain s’échappent de sa queue-de-cheval et lui effleurent la joue. Il approuve son reportage final et se dit qu’il doit trouver une autre raison de la retenir sur son île.  « Dites-moi, Eleanor, aimez-vous la voile? » « J’adore ». Il l’invite à le rejoindre sur la plage. « J’arrive tout de suite. » Elle se rend à sa chambre, prend une douche, se lave les cheveux, met une crème hydratante sur son visage, se maquille, se coupe les ongles, les revernit, peigne ses cheveux, s’enlève le poil sous les aisselles, s’épile les jambes,  revêt son maillot, enfile des tongs roses, cherche ses lunettes de soleil, ajuste son peignoir et sort enfin rejoindre Alexei, un grand sac d’objets absolument essentiels pour faire de la voile sur l’épaule dont un anorak et des bottes de skidoo, on ne sait jamais sur l’eau le temps fraîchit si vite. Elle se rend alors compte qu’il fait nuit! « Câlisse », jure Alexei qui retourne en salle de musculation « sortir le méchant ».

 

Chapitre 6

« Tiens, j’avais oublié un  livre », se dit Eleanor en vidant son sac après son rendez-vous manqué de la veille avec Alexei sur son voilier. Aujourd’hui, sur la plage, elle est étendue sur une chaise longue. Elle pense à Alexei, le plus séduisant des hôtes, attentif, aimable, drôle, ouvert, beau, désirable. Alexei approche et s’asseoit près d’elle se délectant des effluves troublants de la peau de la jeune femme au soleil. Il se fait violence pour ne pas lui caresser le bras. « Vos yeux sont dorés comme ceux d’une jeune panthère. » Il lui enlève ses lunettes, s’incline et l’embrasse légèrement sur la bouche.  Émue, bouleversée, elle ne sait que penser. Sa bouche si sensuelle recherche encore celle d’Alexei. Il l’embrasse et l’embrasse encore avec fougue, sa bouche fouillant celle d’Eleanor.  Elle ne sait plus qui elle est, ni où elle est, tout à ce baiser de plus en plus ardent, de plus en plus profond. Son compagnon l’attire contre lui pour qu’elle éprouve son excitation. Elle se laisse faire, souple, éperdue, heureuse (c’est de même qu’on les aime). « Je veux vous faire l’amour encore et encore, lui sussure Alexei à l’oreille en la lui léchant ». Retrouvant ses esprits, Eleanor lui murmure :  « Cela peut vous paraître idiot mais je désapprouve les aventures de vacances »… « Y en aura pas de facile »,  disait Jacques Demers, l’ancien coach du Canadien.

 

Chapitre 7

Dans son lit, Eleanor est taraudée par la frustration lancinante du désir inassouvi. Elle sombre dans un sommeil agité. Réveillée en sursaut, elle sent une sueur glacée courir dans son dos: d’énormes yeux mauvais la fixent sur le seuil de la porte. Elle hurle. Alexei accourt. Elle se blottit dans le creux de son épaule. « Le monstre à la tête de taureau » était là, hurle-t-elle. D’un doigt, Alexei soulève son visage: « je suis là, il n’y a plus rien à craindre » (méchant prétexte, pense-t-il, elle est mûre pour me tomber dans les bras). Il lui demande de l’accompagner à sa chambre où il lui sera plus aisé de la protéger; elle accepte. Il se glisse dans son lit; elle s’allonge à l’extrême bord opposé du matelas. « vous finirez par tomber si vous voulez dormir ainsi. » Elle rougit dans la nuit. Alexei, qui connaît la largeur exacte de son queen size, l’attire de ses longs bras vers lui. Leurs lèvres se touchent dans un baiser désarmant de douceur. Très vite, Alexei durcit contre le ventre d’Eleanor. Elle étouffe un petit cri lorsqu’il glisse sa main sous sa chemise de nuit. Eleanor est en feu, sa sensualité est décuplée par les émotions de la nuit. Il prend entre ses lèvres les alvéoles gonflées de ses seins, les aspirent, les lèchent et les mordillent. Eleanor s’offre sans retenue. Il la pénètre sauvagement. « Tu m’écrases » dit-elle à son amant qui s’est effoiré sur elle après avoir joui. « Pardonne-moi », dit Alexei, dans un grognement. « Je m’en veux de t’avoir cédé si facilement », réplique Eleanor (ou bien cette femme n’a pas de mémoire ou c’est une agace qui n’a pas été capable de jouer le jeu jusqu’au bout). « Ne t’inquiète pas, je prends la pilule », lui déclare-t-elle, d’un ton détaché. Mmuhmunh, grogne Alexei qui s’en fout complètement. Elle reprend une douche et se glisse de nouveau à l’extrême bord du lit. Elle bénit l’obscurité qui cache son trouble. « Prends ma main et le sommeil viendra », dit Alexei tout à coup réveillé. Elle obéit. Il l’attire vers lui. « C’est à ton tour d’avoir du plaisir. » Eleanor sent les larmes lui monter aux yeux. Il prend ses lèvres pour un long baiser cochon et plonge sa langue dans la tiédeur ardente de sa bouche. Il explore lentement le corps d’Eleanor, aiguise son désir, l’embrasse partout où elle est femme, lui murmure des mots délicieux (comme qu’est-ce qu’on mange demain pour souper?), et seulement quand elle est prête et embrasée, il la pénètre. Dans une ultime envolée exaltante, ils explosent ensemble, dans un même cri, tandis qu’il libère sa semence. « Peux-tu te tasser un peu chéri, c’est trempé de mon bord, signale Eleanor à Alexei, avant de s’endormir blottie contre lui.

 

Chapitre 8

Aux aurores, Elanor se lève sans bruit et enfile son  peignoir. Son compagnon, d’un bond, tel un tigre du Bengale, la rejoint et l’enlace. Elle rit. Le bonheur que lui a procuré Alexei a marqué son âme. « Si nous allions mangé, l’amour m’a ouvert l’appétit », rugit son amant. L’amour a-t-il dit. Eleanor réussit à dissimuler son trouble. « M’aime-t-il un peu, beaucoup, passionnément? Ou ne convoite-t-il que mon corps? » Il l’embrasse légèrement. Elle secoue la tête. « Il est temps de revenir dans le monde réel, Alex. Je dois retourner travailler. » Il rit. « Demain, ma pitoune ». Ils se rendent à la plage. Elle enlève sa blouse et s’étend sur la serviette de bain. « Je peux te passer la lotion », propose-t-il, malicieux. Elle rit. Elle s’élance vers la mer. Il rit. Il la rattrape. Elle rit. Elle l’éclabousse. Il rit. Il joue comme un enfant. Elle rit. « Retournons maintenant, ma jolie nymphe ». Ils se rhabillent, traversent l’île et se rendent au village. Elle s’arrête un instant devant l’église, baissant la tête telle une jouvencelle. De retour au kastro, son château, ils mangent une salade grecque. « Demain, je dois inspecter mes vignobles », dit-il tristement. » « J’ai tout arrangé. Mes  parents viendront me chercher à l’aéroport, dit-elle, un motton dans la gorge. « Ce soir, la nuit nous appartiendra, acheve-t-il. »

 

Chapitre 9

Seule sur la plage, Eleanor embrasse une dernière fois le magnifique panorama avant de se rendre à sa chambre. Un bras vigoureux l’enlace par la taille. Alexei? Une main lui enfonce un chiffon dans la bouche. L’homme lui ligote les poignets brutalement et, sous la menace d’un couteau, la pousse violemment dans l’escalier des souterrains, puis dans le dédale des galeries et des caves. L’homme l’entraîne devant une sorte de faille dans le rocher qui se révèle être une grotte naturelle. L’homme lui retire son baillon. « Que voulez-vous? », lui dit-elle. « Me venger d’Alexei, lui dit-il. Sa mère m’a échappé, c’est vous qui me servirez d’appât. Il entend Alexei descendre en sa direction. « Vous crierez quand je vous le dirai ». « Pour quelle raison vous vengez de lui? » « Je sortais avec une fille superbe, Christina. Dès qu’elle a vu Alexei, elle est tombée amoureuse de lui et m’a laissé tomber. Mais lui, après quelques mois, l’a quittée. Je ne lui ai jamais pardonné. Elle aurait pu être la mère de mes enfants, cette superbe créature alors que j’ai dû me rabattre sur une toutoune avec des vergetures. » Alexei approche, l’homme lève son arme. « Attention Alexei, il a un couteau ». Il lui flanque une gifle. Elle lui assène un coup dans le bas-ventre. Il plie. Alexei bondit et lui écrase le nez d’un direct du droit suivi d’un uppercut au menton. L’homme s’écroule. « Tu es blessée? » Il voit l’enflure sur sa joue et les marques rouges sur ses poignets ligotés. « Sale lâche, t’attaquer à une frêle femme sans défense. » « Sans défense, mon cul, cette salope m’a frappé en bas de la ceinture ». Alexei l’achève d’un coup de coude dans le front. « Tu as sauvé ma mère, aujourd’hui tu me sauves. Tu mérites une récompense. » Il l’entraîne dans sa chambre. « Peut-être as-tu faim? » « Je n’ai faim que de toi. ». « Peut-être as-tu besoin d’être soignée? » « Je ne veux être soignée que par toi. » « À quoi penses-tu? » « Je ne pense pas, je compte… les instants qu’il nous reste à passer ensemble. »  Alexei se dit qu’il a intérêt à être bon. Elle le caresse sans pudeur, sentant avec bonheur son sexe se durcir sous sa paume. Bientôt leurs corps s’unissent avec une urgence sauvage et restent soudés l’un à l’autre. « Reste en moi encore un peu… ». « Je veux bien mais je ne suis pas Denis Robichaud ». Elle lui sourit, malicieuse, le sentant se réveiller en elle. Alors, la tenant étroitement serrée, il commence ce va-et-vient vieux comme le monde qui les conduit à l’explosion suprême.

 

Chapitre 10

Eleanor se réveille le sourire merveilleux d’Alex penché sur elle. Il est habillé, sent bon la lotion après-rasage et ses cheveux sont encore mouillés. « Bonjour ma jolie dormeuse ». Il dépose un doux baiser sur la tête d’Eleanor. « Je dois me rendre en ville remettre le brigand qui t’a attaqué aux autorités compétentes. À mon retour, je t’accompagnerai jusqu’à l’aéroport avec mon hélicoptère ». « Je t’ai vu parler à ton père sur le quai. » « Il est venu m’annoncer qu’il veut se remarier avec ma mère. ». « C’est merveilleux », renchérit Eleanor en se mordant les lèvres, envieuse. Il la quitte à regret.

NOTE: Certaines lectrices de ces résumés seront certainement déçues que celui-ci soit si court. Que voulez-vous, le chapitre ne comportait que 4 pages. Un gars veut ben, encore faut-il qu’il ait de la matière à résumer. Je peux faire une analyse de texte comme lorsque j’étais au cégep, option Poésie, si vous tenez tant à votre nombre de lignes habituel.

« Bonjour jolie dormeuse »: Alexei éprouve une passion inassouvie pour Eleanor mais, en cet instant, il revient d’une séance de musculation, il a terriblement faim, a plus ou moins envie de se redoucher après l’amour et il ne veut pas sentir la bête avant son rendez-vous important. Il faut qu’Eleanor en prenne son parti et attende le retour du guerrier si elle veut encore du sexe.

« À mon retour, je t’accompagnerai jusqu’à l’aéroport avec mon hélicoptère ». Alexei a un hélicoptère et  une île à lui. C’est un bon parti pour une fille. Il faut qu’Eleanor comprenne, malgré son désarroi, qu’il doit vaquer à ses occupations de milliardaire s’il veut conserver son hélicoptère et son île privée. Mais quelque chose m’a dit que, dans le chapitre 11, tous les désirs d’Eleanor seront comblés.

 

Chapitre 11

De retour dans sa chambre, Eleanor met à exécution ce qu’elle a décidé. Elle écrit une lettre à Alexei expliquant son départ: « Ce fut une expérience magique et merveilleuse. Merci pour tout ». Elle fait ses bagages et s’enfuit loin d’Alexei. Car s’imaginer que cette histoire pouvait résister à l’épreuve de la vraie vie était déraisonnable. Elle fait un saut dans la maison familiale et y passe deux jours puis elle retourne au boulot. Son employeur l’accueille avec une brique pis un fanal. « Tu peux m’expliquer ceci? » La manchette d’un journal concurrent titre: Retrouvailles de deux célébrités. Il s’agit du père et de la mère d’Alexei, ensemble, sur l’île de leur fils. « Tu étais sur place et tu n’as rien vu », l’apostrophe-t-il durement. « J’avais promis de ne rien dévoiler », confesse-t-elle. Elle retourne à son pupitre choisir un nouveau sujet d’article. Après ses nuits torrides avec Alexei, rien ne l’inspire plus que les sujets d’ordre sexuel: la parade nuptiale chez les amphibiens qui s’observe surtout par le coassement frénétique du mâle qui produit ce son en gonflant d’air un sac vocal situé dans sa gorge; la période du rut déclenchée par une sorte d’horloge biologique chez certains mammifères qui deviennent sexuellement réceptifs et s’accouplent plusieurs fois par jour, comme Alexei et moi, se rappelle-t-elle avec euphorie; les 75 postures amoureuses du yoga, des classiques aux plus acrobatiques, telles le cobra, le serpent, la demi-chandelle, le singe (ou grand écart), la torsion, la charrue, la demi-sauterelle, le héros allongé, le scorpion (ma préférée), le chien tête en bas, le pigeon royal sur une jambe, et j’en passe. De retour à l’appartement qu’elle partage avec un ami homosexuel, elle décide de prendre un bain. Ça cogne sourdement à la porte. Eleanor revêt en toute hâte son peignoir, repousse ses cheveux mouillés et descend à l’entrée. Alexei est là, plus séduisant que jamais dans son costume en flanelle impeccable. « Tu t’es enfuie? ». « Ce n’est pas moi qui t’ai trahi. L’article sur tes parents est d’une autre source. » « J’ai confiance en toi. Réponds: tu t’es enfuie? ». « C’est parce que je t’aime. » « Moi aussi, je t’aime. » « Tu m’aimes aussi, youppi. Es-tu sincère ou tu me niaises? » « À ton avis, aurais-je accouru en hélicoptère après de toi jusqu’ici, au prix actuel du carburant, si je ne le l’étais pas? ». Eleanor lui saute en cou, froissant son costume en flanelle impeccable jusque-là et l’embrasse goulûment sans se préoccuper du fait qu’elle est nue. « Tu sembles fatiguée, mon aimée? » « Toi aussi mon pitou. Est-ce le décalage horaire ? » « Certes mais je connais une méthode infaillible pour nous remettre d’aplomb. » « Si cette méthode exige un lit, j’en ai un à deux places à te proposer. ». « Partageons-le, nous verrons bien ce qui arrivera. » Ils éclatent de rire en même temps et quelque chose me dit que le costume en flanelle impeccable d’Alexei aura besoin d’un sérieux coup de repassage. Et peut-être d’un nettoyage aussi car, entre les larmes qui lui coulaient sur les joues, Eleanor sentit Alexei s’éveiller contre son ventre. Éperdument heureuse, elle l’embrassa avec fougue.

Fin du roman.

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